Un matin de septembre, en remontant la brume blanchâtre qui colle aux épaules du Sancy, j’ai croisé un père et sa fille, embués de fatigue mais le visage rayonnant. « On voulait voir ce que ça faisait, la montée du Puy de Dôme… par le chemin des Muletiers. » Un silence, un sourire. Cinq mots qui résument cette sensation unique : se mesurer à un volcan, sentir monter le souffle court, suivre les lacets là où, depuis deux millénaires, paysans, pèlerins et muletiers foulaient déjà la cendre et la pierre. Monter au Puy de Dôme par le Chemin des Muletiers, c’est accepter de perdre haleine pour mieux retrouver le goût du vent et la saveur des choses simples.
Sommaire
TogglePourquoi choisir le chemin des Muletiers pour l’ascension du Puy de Dôme ?
Il y a mille et une façons de découvrir le Puy de Dôme, mais le chemin des Muletiers a ce je-ne-sais-quoi de noble et de terrien. On y sent toute la mémoire de la montagne. Loin du petit train à crémaillère, le sentier grimpe en lacets serrés depuis le col de Ceyssat, traversant une forêt où les hêtres et chênes tissent un toit feutré.
En Auvergne, marcher, c’est retrouver un rythme oublié. Ici, pas de décor « instagrammable » à chaque virage : simplement, la montagne. Au printemps, la lumière s’infiltre entre les feuilles, et le chant profond d’une grive interroge le silence. L’automne colore les pierres d’ocres et de rouille. L’hiver, la neige efface tout, et le chemin des Muletiers se fait secret – réserve alors aux plus aguerris.
Prendre ce sentier, c’est déjà renoncer à la facilité. On y croise des visages rouges, suants, parfois hilares – et tous unanimes : « On en bave, mais c’est beau. »
L’itinéraire pas à pas : du col de Ceyssat au sommet du Puy de Dôme
Départ : repères pratiques et premiers mètres
Le point de départ s’attrape facilement : le parking du col de Ceyssat, à 1078 m d’altitude. En haute saison, mieux vaut arriver tôt (ou tard…). Je préfère les départs à l’aube : le massif s’étire lentement, et le soleil rase la brume qui danse entre les houx.
Au pied du sentier, une croix de pierre veille discrètement. Le chemin des Muletiers ici s’impose : caillouteux, parfois glissant, mais jamais vraiment difficile pour qui prend son temps. On franchit rapidement le seuil de la forêt — odeur chaude d’humus, de feuille retournée — et puis, cette impression : le silence posé là, comme un vieux manteau.
Montée en lacets et paysages
La montée, c’est une succession de lacets, réguliers, bien praticables. On s’élève, doucement mais sûrement. Le chemin vous fait gagner 407 mètres de dénivelé pour 2,8 km jusqu’au sommet – comptez facilement 1h15 à la montée, plus si l’on savoure chaque halte.
À mi-chemin, la végétation s’ouvre : vue sur la chaîne des Puys, le regard racle la plaine de Limagne, puis remonte en dentelle sur les autres volcans. On respire le volcan. Par jours humides, la pierre suinte et la mousse s’imprègne d’eau, odeur de cendre lavée qui colle au bout des doigts.
Arrivée au sommet : le temple de Mercure et la magie des panoramas
Les derniers mètres — une rampe presque droite, bordée de pentes couvertes de granit. Là, la lumière devient presque blanche lorsque les nuages s’accrochent à la croix sommitale. On arrive brusquement sur le plateau, surpris par la vasteté.
Première découverte : les ruines du temple de Mercure (IIe siècle ap. J-C) : murs massifs, grandioses, qui résistent à tous les vents. On s’assoit sur une pierre tiède : entre ciel et terre, difficile de ne pas sentir passer tout un pan d’Histoire.
Puis vient le tour du panorama. Par temps dégagé, le regard plonge jusqu’à Clermont-Ferrand au nord, distingue Issoire au sud, et repère les puys alignés comme des frères : Pariou, Montchal, Sancy… L’œil se perd sur 360°, emporté par la lumière dure ou les ombres qui dévalent le matin.
J’aime m’asseoir ici, dos tourné à la foule, pour croquer un morceau de Saint-Nectaire affiné, les jambes pendantes dans le vide, une gorgée d’eau fraîche au creux de la main. Ce n’est pas du luxe : c’est de la gratitude.
Préparer sa randonnée au Puy de Dôme : conseils pratiques de terrain
Quand partir ?
L’été attire le plus de monde. Mon conseil ? Privilégier le printemps ou l’automne, quand les foules sont rares, et le sentier plus silencieux. En été, tentez un départ avant 8h (ou après 16h) pour profiter des lumières rases et de températures supportables. L’hiver, l’ascension se complique : neige, verglas, brouillard s’invitent sans prévenir. Renseignez-vous toujours sur les conditions la veille.
Que mettre dans son sac ? (petite check-list du randonneur auvergnat)
| Équipement | Pourquoi c’est utile | Antoine recommande |
|---|---|---|
| Chaussures de marche | Chemin caillouteux, parfois glissant. | Pieds maintenus, montée sans souci. |
| K-way/coupe-vent | Vents forts au sommet, météo changeante. | Une pluie soudaine, ça arrive plus vite qu’on ne croit. |
| Gourde (1L minimum) | Peu d’ombre, pas de fontaine sur le chemin. | L’eau fraîche a un goût de victoire en haut. |
| Petite laine | Température plus fraîche dès 1200m. | Un pull même en août, ça sauve un pique-nique. |
| Casse-croûte local | Petite faim sur le chemin ou au sommet. | Saint-Nectaire, saucisson sec, pain de campagne. C’est bien meilleur au vent. |
| Paire de bâtons (facultatif) | Aide à la montée et à la descente, surtout si fatigues ou genoux sensibles. | Moins d’effort, plus de profit. À chacun son style ! |
Accès, parkings et alternatives écologiques
Le parking du col de Ceyssat est le plus proche, mais il se remplit vite dès le mois de juin. Si vous voulez éviter la voiture, la ligne de bus n°5 relie Clermont-Ferrand à Orcines. De là, une navette dessert le col. En pleine saison, n’hésitez pas à tester le covoiturage (j’utilise souvent la plateforme locale : Mobicoop). Enfin, pour les adeptes des mobilités douces : la montée à vélo par la D68, puis à pied, est une alternative tonic.
Attention : pour préserver le site, il est strictement interdit de sortir des sentiers balisés. Les prairies d’altitude sont fragiles, le moindre pas en dehors laisse une trace pour longtemps.
Rencontre avec le passé : petites histoires du chemin des Muletiers
Il m’est arrivé, en descendant sous la pluie, de tomber sur un vénérable marcheur, chapeau bas et voix blanche. « Les muletiers, disait-il, ils transpiraient deux à trois fois par semaine ici, chargés de sel et de blé, pour rejoindre la ville. Ce n’était pas du sport, c’était la vie. » Je me raconte souvent cette anecdote, en croisant un randonneur qui râle contre la pente. Sur ces pas cabossés, on remonte la même histoire, même si nos chaussures sont plus techniques.
Avant les muletiers, il y eut les pèlerins. Avant eux, les druides, venus déposer un caillou au sommet comme offrir un vœu au vent. Cette dimension sacrée flotte encore, par bribes, surtout certains matins de brume où le volcan se fait cathédrale.
Le sommet : observer, ressentir, ralentir
Arriver en haut, c’est toujours un choc. Il y a du monde, parfois, mais il suffit de s’asseoir derrière une touffe de genêts pour s’extraire du flot. Par vent fort (ce qui arrive souvent), le bruit s’efface. On entend alors le chant filé d’un milan noir, le crissement des sacs à dos, et le bruit du cœur qui ralentit enfin.
Ouvrez l’œil : le ballet des parapentes offre un spectacle hypnotique, rubans colorés vrillant dans le ciel au-dessus du cratère. On se prend à rêver — s’élancer dans le vide, ou simplement rester là, le visage offert à la lumière du soir.
C’est le meilleur moment pour sortir un carnet, gribouiller une pensée, ou simplement laisser venir la bouffée de gratitude qui remonte avec la fatigue.
Redescendre… et prolonger l’expérience (bonus “slow trip”)
La descente par le chemin des Muletiers n’est jamais anodine : attention aux chevilles sur les pierres roulantes, et qui va doucement revient entier. Pour ceux qui aiment flâner, je conseille de prendre une demi-heure au col de Ceyssat au retour, au café-restaurant du coin (maison auvergnate, terrasse ombragée, soupe fumante l’hiver…). L’occasion d’échanger quelques mots avec d’autres randonneurs, ou de découvrir un producteur local venu ravitailler la cuisine.
Pour les plus curieux, poursuivez la journée par une visite de Saint-Nectaire (église romane, producteurs de fromage) ou du lac Servières, à dix minutes en voiture. L’essentiel, après une telle marche, c’est de garder ce rythme lent — pied léger, esprit ouvert, cœur apaisé.
Petit zoom sensoriel : souvenirs sur le sentier
Quelques images qui me reviennent, inlassablement :
- Un matin d’octobre, la brume court en avalanches sur la houle verte des puys.
- Sous les chaussures, la pierre volcanique sonne mat — le bruit sourd d’un vieux sol vivant.
- À la sortie du bois, une odeur de gentiane froissée, fraîche et amère.
- Au sommet, une tartine tiède, beurrée au couteau, trempée dans la lumière.
- Le sifflement du vent, qui n’a jamais que ce mot à la bouche : patience.
Voilà, on n’oublie pas une première montée au Puy de Dôme… ni la dixième, d’ailleurs. Car même ceux qui croient avoir tout vu la redécouvrent, une fois les bottes aux pieds.
Questions fréquentes sur la randonnée au Puy de Dôme par le chemin des Muletiers
Combien de temps prévoir pour faire l’ascension ?
Comptez entre 1h15 et 1h45 à la montée, selon votre rythme (et vos pauses photos ou pique-niques). La descente dure environ une heure. Aller–retour : tablez sur 2h30 minimum.
Le chemin des Muletiers est-il difficile ?
Il est accessible à tout randonneur en forme, même avec des enfants habitués. La pente est soutenue, mais le chemin est bien marqué et sans danger par temps sec. Prévoyez de vraies chaussures !
Quelle est la meilleure période de l’année pour monter au Puy de Dôme ?
D’avril à octobre, quand la météo est clémente et les panoramas dégagés. Évitez les journées de forte chaleur ou de brouillard épais. L’hiver, ascension réservée aux randonneurs aguerris et équipés.
Où se garer et existe-t-il des alternatives à la voiture ?
Le parking du col de Ceyssat est le point de départ standard, mais il est vite complet en pleine saison. Privilégiez bus, navettes, ou covoiturage depuis Clermont-Ferrand.
Peut-on pique-niquer au sommet ?
Oui, mais gardez à l’esprit qu’il n’y a pas d’ombre ni de point d’eau. Ramenez vos déchets, et prenez le temps de savourer chaque bouchée : le fromage local a un goût particulier, là-haut, entre ciel et laves anciennes.
Voilà, tout est là : un sentier, un sommet, et l’envie de marcher. Le Puy de Dôme par le chemin des Muletiers n’est ni une performance, ni une photo de carte postale. C’est un rendez-vous avec la patience, la beauté brute, et peut-être… un bout de vous-même à redécouvrir.
À bientôt, sur le sentier ou autour d’une table de ferme — on se racontera, promis, les petites victoires et les grandes soifs d’Auvergne.